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Marine Bellégo. La botanique au service de l’idéologie ? Le jardin de Calcutta, XIXe siècle
Créé à la fin du XVIIIe siècle par la East India Company, le jardin botanique de Calcutta devint un centre d’acclimatation et de classification d’espèces végétales et connut un âge d’or pendant le dernier tiers du XIXe siècle. Financé par l’empire britannique, alors à son apogée, dont Calcutta demeura la capitale en Inde jusqu’en 1911, le jardin contribuait à la fois économiquement et symboliquement au dispositif impérial. En même temps qu’il servait les capitalistes britanniques en favorisant l’exploitation agricole des terres colonisées, le jardin incarnait un discours historique selon lequel la colonisation était une entreprise civilisatrice. Son espace sémiotiquement dense mettait en scène la maîtrise coloniale de la nature : les plantes, spécimens et publications qu’il produisait alimentaient le fonctionnement à la fois matériel et discursif d’un pouvoir qui se disait mondial, fécond et scientifique. Les histoires du jardin issues de la sphère coloniale ont donc logiquement insisté sur son rôle dans la dissémination de nouvelles espèces en Inde. L’espace du jardin, tout comme les histoires produites par ses directeurs, participait à nourrir la production idéologique coloniale de l’Empire Britannique.